A Paris, Paul Biya n’est pas venu inaugurer les chrysanthèmes. Le président de la République veut intégrer la préservation du bassin du Congo et le sauvetage du Lac Tchad dans le traité qui sera signé au sortir de la 21ème conférence de l’Onu sur les changements climatiques.
Paul Biya n’y est pas allé par quatre chemins. Pour dire et faire entendre la voix du Cameroun au Bourget, il a choisi des formules dénuées de fioritures. Et il a réussi à captiver son auditoire. « Nous devons sauver les forêts du bassin du Congo ». Devant la salle des plénières, quelques membres de la délégation camerounaises trépignent de bonheur. Comme le tout nouveau directeur de l’observatoire national sur les changements climatiques. Le Pr Amougou : « Le président de la république défend fortement et valablement les forêts du bassin du Congo. Il faut que les forêts tropicales fassent partie du traité. Que le REDD (réduction des émissions dues à la déforestation et à la dégradation, Ndlr) soit un sujet qui rentre dans le nouveau traité. »
A quelques pas de là, au stand de la Communauté économique des Etats de l’Afrique centrale, les experts venus des pays membres boivent du petit lait. Ils en sont tous à penser que le discours du Président Paul Biya vient renforcer davantage la position commune arrêtée à Libreville le 27 août 2015 qui réaffirme la nécessité pour la communauté internationale de rendre disponible des financements adéquats pour la mise en œuvre de la phase du REDD+.
Des réponses à ces sollicitations commencent à être apportées. Le président français François Hollande, lors du sommet « défis climatiques et solutions africaines » tenu lundi 30 novembre, peu après le discours du Président Paul Biya, a espéré que « la COP21 permette la réalisation de projets concrets en Afrique, facilite l’adoption d’un modèle de développement plus sobre en carbone et accompagne l’adaptation au dérèglement climatique observé sur le continent. Et de poursuivre : L’Afrique, qui n’est pas responsable du changement climatique, en subit pourtant déjà les plus graves conséquences. » Il a également indiqué partager le souhait des pays africains pour que les financements en faveur de l’Afrique soient mobilisés le plus rapidement possible, sans attendre 2020 comme préconisé par le projet d’accord. Une autre victoire.
Mardi 1er décembre, ce sont les ministres des forêts d’Indonésie, d’Amérique latine et d’Afrique qui se sont penchés sur la conservation et la restauration des massifs forestiers, notamment le bassin du Congo. Pour eux, les projets à envisager doivent spécifier quelles actions vont être mises en œuvre dans chacune des régions dont les forêts sont impactées par les changements climatiques.
Financements
Le Cameroun, par la voix de Paul Biya, ainsi que les nombreux autres pays africains présents à Paris, souhaitent que les financements à mobiliser dans le cadre du fonds vert permettent effectivement de soutenir les nombreuses politiques publiques mises en place dans les pays. Dans le secteur de l’électricité par exemple, les difficultés de financement des barrages hydroélectriques sont légion, du fait de leurs coûts exorbitants. Mais il reste le solaire. L’Inde, qui a connu des résultats spectaculaires dans ce domaine en portant la puissance de ses centrales solaires de 20 à 20 000 mégawatts en 5 ans, a organisé un forum autour de la question. Présidé par le premier ministre Narendra Modi, de nombreux pays africains y sont venus pour étudier les mécanismes pouvant faciliter la transposition de cette expérience sur le continent.
Plusieurs personnalités, pays et institutions ont déjà montré leur disponibilité à mettre la main à la poche. C’est le cas Bill Gates, qui a réuni autour de lui 27 autres milliardaires afin de soutenir le développement des énergies propres dans les pays les plus pauvres. C’est aussi le cas de la banque mondiale, qui va mettre 500 millions de dollars dans la cagnotte. La France, hôte de la conférence va porter son effort à 2 milliards d’euros sur 5 ans. L’Allemagne compte doubler sa contribution au fonds vert. Le Canada a annoncé une augmentation significative de sa contribution. Seulement, selon les experts, il manque encore près de 20 milliards de dollars. On attend encore les annonces des Etats-Unis et de la Chine, les deux principaux pollueurs de la planète.
Mais le véritable challenge pour le Cameroun sera de monter des projets capables de capter les financements aussi bien du fonds vert que des autres guichets ouverts dans les pays développés. Et ça c’est le principal défi à relever par l’observatoire national sur les changements climatiques rendu opérationnel par un décret de Paul Biya.